Freedonia

Let It Come Down


A1: A Tanger, Nadia T. restait un mirage. Dans la chaleur de la nuit, zébrée de moustiques, au bout d’un labyrinthe d’escaliers, tout en haut du riad, était ma chambre : au téléphone, Nadia disait qu’elle devait garder l’ombre à Casa.
A2: Dans les passages fuyait le souvenir de Bowles et de Capote, de Francis Bacon, des garçons à louer et de leurs beats, des changements de sexe et de l’Interzone, du haschich et du LSD, des souks et des bordels chics. Sous la menace du présent et de l’argent, «Tanger – danger» s’était fait la malle depuis longtemps.
A3: La vieille cité et la ville neuve, l’arabe et «l’internationale», parlaient d’opulence marchande, et pas qu’au passé. Le Roi, les émirs du Golfe, BHL, l’Expo 2012, tout conjurait à faire de la ville un resort, un hub, un country-club bien propre sur lui. Les halls délabrés et les ruelles interlopes reculaient inexorablement.
B1: Look de surfeur, Franck redoublait d’irritation contre l’aberrante politique du gouvernement. Son blackberry lui foutait curieusement la paix.
B2: Au cap Spartel, on avait nagé tout juste le temps d’attraper des coups de soleil.
B3: Et au café Hafa, dernier lieu où l’on fume, on songeait toujours face aux mers calmes en prenant le thé à la menthe. Plus d’écrivains pouilleux ni de tapins : les jeunes gens, quelques jeunes femmes, la simple jeunesse de Tanger, venaient contempler l’Europe à portée de désir. Toujours le même lieu, non les mêmes rêves.

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