Two points.
L’autre jour j’ai pris un verre dans le pub inverti de Szohod et ils passaient leur bande-son (la seule), avec notamment une daube entraînante dans une langue latine difficile à identifier. Après j’ai chanté le refrain en boucle toute la semaine, même effet que les chanteuses idiotes de Gilles. Ca m’a donné envie de compléter Radio Freedonia, le Fritalux du bon son, avec encore plus de chansons Eurovision aux langues, aux pays et/ou aux résultats improbables.
Françoise Hardy. – L’amour s’en va (Monaco, 1963; 5ème ex ae.)
A l’époque, on s’exile à Monaco pour fuir ses ex- et non le fisc. Françoise rencontre Jean-Jacques Ferroyer-Blanchard, un psychanalyste lacanien. Il lui conseille de se mettre à l’astrologie et d’arrêter de fréquenter Françoise Sagan pour vaincre la dépression qui a fait d’elle une daurade.
Thérèse Steinmetz. – Ring dinge ding (Ruritanie, 1969; 14ème ex ae.)
Malgré sa coupe de cheveu piquée à Diana Ross et le décor en miroirs tournants d’un bordel d’Amsterd@m, Thérèse avait le charisme d’une guichetière de la CAF. Il faudra attendre 1975 pour que le même pays, la même permanente et le même titre l’emportent. «Tout ça parce que cette pétasse de Teach In était blonde et bougeait ses fesses», déclara Thérèse Steinmetz. Elle mourut peu de temps après, pendue à un canal.
Lulu. – Boom-Bang-A-Bang (Royaume-Uni, 1969; 1er ex ae.)
Pourtant, la même année, d’autres avaient déjà compris la tactique. Barbie LSD, Lulu chante l’amour coquin et le Flower Power par onomatopées et l’emporte. Champagne for Lulu!
Sandie Jones. – Ceol an ghrá (Irlande, 1972; 15ème)
Du lyrisme à culotte de peau et glockenspiel, en provenance directe du Tyrol gaëlique. L’Eurovision, toujours à la pointe des mouvements musicaux et de la lucidité politique, fête en beauté le Bloody Sunday.
Los Mocedades. – Eres Tu (Espagne, 1973; 2ème)
Los Mocedades. – C’est pour toi (Eres Tu French Version)
Los Mocedades. – Zu Zara (Eres Tu Euskara Version)
Voilà, la chanson entendue au pub — elle a eu un énorme et durable succès chez les gens de mauvais goût. Trois versions (il en existe d’autres), c’était le minimum pour célébrer un groupe trentenaire, qui a connu en tout 27 membres différents. Je ne sais pas si les autres sont morts dans la lutte armée basque ou se sont juste fâchés avec le guitariste casse-couilles. Tous leurs looks sont parfaits, du noeud papillon oversize du choriste à la chanteuse qui a ensuite été doublure lumière de la Princesse Leïa.
Pepel in Kri. – Dan Ljubezni (Yougoslavie, 1975; 13ème ex ae.)
ll y avait certainement une rotation très Union Européenne de Radiodiffusion entre les diverses langues de la Yougoslavie; en 1975, c’était slovène. Air de scie musicale, rengaine langoureuse, tout pour sonoriser les étés du camarade-maréchal à Brioni avec ses amis les pipoles à perruques (Liz Taylor, Sophia Loren, Khadafi etc.).
Lynsey de Paul & Mike Moran. – Rock Bottom (Royaume-Uni, 1977; 2ème)
Les Anglais ne se sont toujours pas remis que Marie Myriam ait torché les pianistes siamois de Savile Row et leur version Broadway de «Chapeau Melon et Botte de Cuir».
Baccara. – Parlez-vous français? (Luxembourg, 1978; 7ème)
Baccara. – Parlez-vous français? (English Version)
Epaules nues, playback foireux, idiome et propos de bordel chic, décor en papier alu, robe en point de Bruges, chorégraphie de naïade. Quelque part entre Tom Ford et Max Pécasse. En bonne logique, et comme en témoigne YouTube, la chanson eut un grand succès avec les personnes transgenre israëliennes, dont Dana International.
Maria Rita Epik & 21 Peron. – Seviyorum (Turquie, 1979; hors concours)
La Turquie dut déclarer forfait pour cause d’angine blanche de Maria Rita Epik et de tenue du concours en Israël. Il s’agissait pourtant d’une sympathique chansonnette accompagnée à la balalaïka électrique par la dynamique équipe du «Pacific Princess».
Liora. – Amen (Israël, 1995; 8ème)
Probablement ma chanson ESC préférée de tous les temps, grâce à elle je suis devenu homosexuel. J’ai regardé le concours de l’Eurovision cette année-là, tout seul chez mes parents. Olivier Minne faisait des blagues marrantes, du genre «soyez attentifs, va falloir compter le nombre de amens». Sortir du placard, pour ne plus jamais passer un samedi soir seul devant la télé. Pour pouvoir faire des vannes qui cassent. Pour prendre des ecstas mais danser le madison. Pour le botox et porter une jupe blanche ras la foune.
Tags: Eurovision, Françoise Hardy, radio